Face au mur
Création au Théâtre de la Balsamine de Bruxelles du 6 au 10 février 2007.
Tout va mieux. Ils font du bateau, ils peuvent sourire sous un « ciel bleu ciel », ils sont maintenant entourés de gens comme il faut, on a installé autour de chez eux un meilleur éclairage de rue etc, tout va mieux. Bien sûr celui-là abat à bout portant plusieurs enfants dans une école primaire, bien sûr eux mettent le feu à des voitures après les avoir renversées, bien sûr celle-ci finit par aimer, non, haïr, non, aimer son mari, son enfant mais bon dans l’ensemble les choses d’améliorent, vraiment les choses s ‘améliorent.
« Face au mur » est un spectacle composé de trois textes courts du dramaturge anglais Martin Crimp (« Face au mur », « Tout va mieux », « Ciel bleu ciel ») qui, dans une langue taillée au scalpel, disent la complexité de la société contemporaine, hantée par la violence et le doute, avec un humour constant, « tendre et cruel » comme la vie.
Presse
Soudain, dans le hall paisible de la Balsamine où le buffet a fait pétiller ses saveurs, éclate la musique de Supertramp. Et apparaissent trois acteurs. Alexandre Aflalo et Steve Driesen en costume blanc, Dorothée Schoonooghe en robe dorée et veste noire. Ils courent, s'arrêtent, repartent, finissent par mener le public vers la petite salle, en haut. De rengaine un peu kitsch, la chanson deviendra, en écho au spectacle, pleine de sens. "Please tell me who I am" : voilà purement et simplement posée la question que soulève le théâtre de Crimp. Sous le titre "Face au mur", le Théâtre tu a glissé aussi deux autres textes brefs de l'auteur britannique, "Tout va mieux" et "Ciel bleu ciel". Les géographies diffèrent, le motif demeure : l'humain - dans ses cruautés drolatiques, ses doutes, ses hésitations, sa redoutable violence, sa douceur parfois. La langue dont s'emparent les trois comédiens (rejoints sporadiquement, dans la première partie, par Jean-François Demeyère, mi-souffleur mi-démiurge), pour tranchante qu'elle soit, n'omet ni la tendresse ni l'humour de la vie dont elle se nourrit. Une vie aux parfums parfois absurdes, considérée avec lucidité, virulence, tout imprégnée qu'elle est d'images dont la beauté le dispute à l'insoutenable. Le plateau, cerné par le public sur ses quatre côtés, se contente de tables blanches, de tabourets rouges, de parpaings brisés. Et d'un décor sonore aussi discret que redoutablement efficace, du coeur qui bat au pépiement d'oiseau, en passant par le murmure. Aux commandes, Jean-François Demeyère a privilégié le mouvement et l'écoute. Entre les interprètes, la complicité, palpable, sincère, salutaire, répond avec puissance à l'ironie du propos. "Comment trouver les moyens de vivre en profondeur, entourés que nous sommes d'un nombre croissant de valeurs et de référents superficiels ?", note le metteur en scène au sujet de ce spectacle qu'il traite avec respect, mais sans révérence. Pour un résultat tonique, un peu étrange, souvent cinglant.
Marie Baudet, La Libre, 8 février 2007 Tweet
Cette mise en chair du verbe de Martin Crimp navigue très efficacement entre l'abstraction de rapports cliniques et la tension angoissante des êtres qui sont face au mur, le mur de leurs mémoires, de leurs histoires, à gravir... Les trois excellents comédiens, Dorothée Schoonooghe, Steve Driesen et Alexandre Aflalo, s'y livrent avec une sorte de jubilation froide, précise, troublante.
Michèle Friche, Le Soir, 9 février 2007 Tweet
DISTRIBUTION & CREDITS
Texte Martin Crimp
Mise en scène Jean-François Demeyère
Interprétation
Alexandre Aflalo
Steve Driesen
Dorothée Schoonooghe